Yves Ortais, président de la PME de Gémenos, laissera en héritage une microcapsule novatrice au marché prometteur. Peu d'entrepreneurs accepteraient de lâcher la pépite qu'ils viennent de trouver. C'est pourtant le cas d'Yves Ortais. Le président de la PME Gem'innov, spécialiste de la microencapsulation, vient de mettre au point avec le CNRS une technique novatrice, qu'un autre, pourtant, exploitera sur le marché mondial qui lui tend les bras. Car à 66 ans, le dirigeant a décidé de raccrocher les gants. Cette pépite, née dans le laboratoire marseillais du CNRS, sous le microscope de l'équipe de Yohann Guillaneuf et Catherine Lefay, a été baptisée Genesis. C'est un procédé qui permet d'employer le PBAE (voir ci-dessous), à la place de la mélamine formaldéhyde, un matériau massivement utilisé aujourd'hui dans toutes sortes d'industries mais qui, lutte contre les microplastiques oblige, sera interdit à la vente en juillet 2021 par l'Union européenne. "Notre métier d'origine, c'est la capsule thermochromique, qui traduit la température en changeant de couleur, rembobine Yves Ortais. Puis en 2008, nous nous sommes lancés dans la microcapsule parfumée et bien-être (anti-odeur...)." Anticipant la réglementation européenne, Gem'innov s'est tournée vers le CNRS en 2018. "Une petite société familiale comme la nôtre n'a pas les moyens nécessaires pour mener des recherches en chimie fine", justifie Yves Ortais. Fin mai 2019, le brevet qui protège le procédé est déposé. Gem'innov et le CNRS en sont les co-inventeurs, les bénéfices futurs revenant à 80 % à l'entreprise de Gémenos, 10 % au CNRS et 10 % à Aix-Marseille université. Biodégradable et saine pour la santé Pas plus grande qu'un dixième de cheveu humain, Genesis est donc biodégradable et saine pour la santé. Une microcapsule non seulement capable de remplacer au pied levé sa petite soeur de mélamine formaldéhyde au même prix, avec les mêmes équipements et les mêmes durées de productions, mais aussi apte à viser un marché plus large, notamment celui de la cosmétique où le matériau a déjà fait ses preuves. Car la mélamine formaldéhyde, elle, ne convenait pas au contact profond avec la peau. "Un exemple, illustre Yves Ortais, c'est celui de la cire à épiler. Depuis 10 ans, nous travaillons avec une filiale de Reckitt Benckiser (géant mondial pharmaceutique, Ndlr), sur une cire dotée de microcapsules qui changent de couleur en fonction de la température et évitent de se brûler. Nous allons enfin la sortir !". Le marché de la détergence, celui des phytosanitaires, des papiers sans carbone et d'autres encore constituent de nouveaux terrains de jeu pour Genesis. "Mais nous sommes trop petits pour adresser un tel marché. J'ai donc décidé de mettre en vente l'entreprise, avec la licence : l'activité, la plateforme et l'assise scientifique.", conclut Yves Ortais. Qui, s'il refuse de dévoiler le montant de la mise à prix (proche de la centaine de millions d'euros), précise : "Le repreneur devra garder le "cerveau", la plateforme de recherches avec le CNRS en local, à Gémenos". À bon entendeur, pépite à saisir...
Source :
La Provence